Le recrutement par les appétences, privilégier l’aimer-faire au savoir-faire

Comment permettre à des personnes de changer de métier alors qu’elles n’ont ni les diplômes, ni l’expérience ?

En privilégiant l’aimer-faire (les appétences) au savoir-faire (les compétences).

Avant de découvrir le contenu de cet article, nous vous invitons à regarder ces deux vidéos.

https://www.youtube.com/watch?v=RlmrZY-aA5c

La journée des recrutements innovants de juin 2022

https://www.youtube.com/watch?v=ufpRuKBAHms

Les rencontres sans C.V. de mai 2019

Selon la récente enquête de B.M.O. (Besoins en main-d’œuvre), les entreprises françaises ont plus de 3 millions de projets de recrutement en 2022 mais 57,9% de ces recrutements sont jugés compliqués (13 points de plus qu’en 2021) alors que, de l’autre côté, le nombre de demandeurs d’emploi stagne à 7% depuis un an (A).

Les entreprises doivent relever deux défis majeurs : trouver des candidats et éviter les départs. Le nombre de ruptures contractuelles à l’initiative des salariés augmente (B) et devient historiquement haut à environ 500.000 démissions par trimestre depuis la fin de l’année 2021 (C).

Autre point important, entre 255.000 et 390.000 recrutements ont été abandonnés en 2021, faute de candidats adéquats, selon Pôle Emploi (D).

Comment faire face à ce « casse-tête » ?

Sommaire

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    Parce que toujours plus de la même chose produit les mêmes effets

    Selon le baromètre de novembre 2021 de la BPI, 79% des P.M.E. déclarent rencontrer des difficultés de recrutement. Lorsqu’on les interroge sur l’origine de ces difficultés, 70% déclarent qu’elles ne reçoivent tout simplement pas de candidatures, 37% que les profils n’ont pas les qualifications requises et 35% que les candidats manquent d’expérience.

    Ce constat est confortée par une enquête présentée par la C.P.M.E. au mois de juillet 2022 qui met en avant que 90% des P.M.E. ne parviennent pas à recruter parce qu’elles ne trouvent pas le « bon profil ».

    Il semble donc que la principale difficulté rencontrée repose sur une inadéquation entre les profils des emplois qu’elles proposent et ceux des candidats.

    Pourquoi les entreprises accordent-elles autant d’importance aux diplômes alors qu’elles déclarent en parallèle que 42% de leurs postes à pourvoir ne nécessitent aucun diplôme et 44% requièrent au maximum un brevet des collèges, un C.A.P. ou un B.E.P. ?

    Et lorsqu’on leur demande ce qu’elles ont entrepris suite à ce constat, 38% répondent avoir modifié leurs modes de recrutement comme, par exemple, mandater un cabinet de recrutement, faire paraître leurs annonces sur les réseaux sociaux ou démarcher chez leurs concurrents. Autrement dit, elles persévèrent dans l’idée qu’elles doivent impérativement trouver des candidats qui répondent aux exigences de l’emploi.

    La difficulté de recrutement n’est pas nouvelle, ni la vague de démissions d’ailleurs qui est, d’après la Dares, un phénomène fréquent au sortir d’une crise majeure, comme ce fut le cas en 2008.

    Si les crises ont pour incidence une augmentation du turn-over, les raisons de ces démissions varient selon leurs natures. C’est pour cela qu’il est indispensable de comprendre, d’une part ce qui a motivé de nombreux salariés à vouloir quitter leur entreprise, et, d’autre part quelles sont les raisons qui font qu’ils se montrent plus exigeants vis-à-vis des propositions qui leur sont faites.

    Certains considèrent que l’absence de candidatures serait due à un système de protection sociale qui n’incite pas les personnes en recherche d’emploi à retravailler (Rappelons que le montant moyen des allocations chômages en 2022 est de 1.290 € brut pour un S.M.I.C. à 1679 € brut). D’autres, adeptes de la théorie X de Douglas McGregor, expliquent que cela serait dû au fait que « L’être humain n’aime pas le travail et l’évitera tant qu’il le peut ».

    C’est peut être vrai pour certaines personnes mais nous croyons que les réticences à postuler ont d’autres origines.

    Quand confinement rime avec changement

    Selon l’étude réalisée par la C.P.M.E., 51% des sondés déclarent vouloir changer de secteur. Que s’est-il passé ?

    Bien que certains salariés soient restés en activité, l’anxiété générale provoquée par cette crise sanitaire et le confinement inédit qui, rappelons-le, a duré 149 jours entre mars 2020 et mai 2021, ont été une occasion inédite pour beaucoup de Français de prendre le temps de s’interroger sur leur vie, en général, professionnelle, en particulier.

    De nombreuses études réalisées ces 2 dernières années ont mis en évidence les trois principales questions que ce sont posées les salariés durant cette période :

    • « Mon métier fait-il sens pour moi ?»
    • « Mon métier est-il source d’épanouissement ?»
    • « Suis-je en phase avec mon entreprise ?»

    Il y a fort à parier que les réponses négatives à ces questions sont à l’origine de cette vague de démissions et des nouvelles exigences des salariés.

    Pour faire face aux difficultés d’attractivité, de nombreuses entreprises ont misé sur l’amélioration de la qualité de vie et des conditions de travail (Q.V.C.T.), la négociation d’accords sur le télétravail  et des augmentations des salaires (E).

    Cependant, comme nous l’évoquerons plus bas, améliorer les conditions de travail et augmenter les salaires n’a pas d’effet direct sur l’épanouissement professionnel qui est devenu, depuis le déconfinement, le premier critère de sélection d’un emploi.

    Épanouissement professionnel, de quoi parle-t-on ?

    Qu’entend-on par épanouissement ? Il semble bien qu’il règne une certaine confusion sur  la signification de ce mot. Certains parlent de bonheur, d’autres de bien-être, de joie, de plaisir, de passion, de motivation ou encore de satisfaction.

    Lorsque l’on évoque la notion d’épanouissement, qui signifie « s’ouvrir », à l’image d’une fleur qui éclot, il est assez courant de faire référence à deux principaux ressentis. Celui de « Bien-être » (ou bonheur) et celui de « Plaisir ». Or ces deux sentiments sont vraiment différents.

    Pour faire simple, le bien-être (ou bonheur) est un ressenti provoqué par la sérotonine, qui est une molécule qui calme et qui apaise. C’est ce que nous ressentons, par exemple, lorsque nous nous baladons sur une plage en admirant un coucher de soleil.

    Différent, le plaisir est un ressenti provoqué par la production de dopamine, hormone à l’origine de l’excitation. Du XIème siècle et dérivé de « Plaire », cet état survient lorsque l’on satisfait un désir ou lorsque l’on accomplit quelque chose de gratifiant.

    Contrairement à ce que l’on pourrait croire, cela fait plus de 10 ans que les sondages mettent en avant qu’environ 80% des salariés déclarent être heureux au travail, ce qui est totalement compréhensible compte tenu des nombreuses actions qu’ont mises en œuvre les entreprises pour améliorer les conditions de vie au travail.

    Bien que plus exceptionnelles, les études sur le plaisir au travail mettent en avant que seulement 20% des actifs éprouvent ce sentiment. C’est peu et c’est sans doute ce qu’attendent à présent les salariés.

    Il semble bien que cette année de confinements et de couvre-feux, à l’origine de nombreuses souffrances et frustrations, aient fait naitre chez de nombreuses personnes l’envie d’exercer un métier qui soit source de plaisir.

    C’est pourquoi le besoin d’épanouissement exprimé par les Français au sortir de cette crise ressemble davantage à une quête de plaisir qu’à une recherche de bien-être.

    Si le bonheur au travail est une préoccupation qui date du début du XXIème siècle, le management du plaisir au travail n’en n’est encore qu’à ses balbutiements.

    Qu’est-ce qui est à l’origine du plaisir au travail ?

    Nous voilà donc au cœur du sujet.

    Contrairement à la motivation ou au bien-être, il n’existe pas de concepts spécifique qui traite du plaisir au travail. Il s’agit donc d’un champ d’exploration nouveau qui nécessite, en premier lieu, d’identifier les facteurs à l’origine de ce ressenti.

    Cela fait plus de 12 ans que nous travaillons sur ce sujet. Nos travaux reposent sur une seule question, posée à des milliers de personnes : « Quels sont les 2 facteurs qui vous provoquent le plus de plaisir au travail ? ».

    Avant de découvrir les résultats de cette étude, nous vous proposons de prendre le temps de répondre par écrit à cette question.

    L’agrégation des réponses de milliers de salariés, aux statuts et fonctions différentes, en France et à l’étranger, travaillant au sein de PME et de multinationales, a permis d’identifier 4 principaux facteurs de plaisir au travail.

    1. Les facteurs liés aux conditions de travail : Le lieu, le matériel, le salaire, les horaires, l’organisation.
    2. Les facteurs liés à l’entreprise : La notoriété, la marque, la stratégie, ses projets, ses valeurs, l’offre.
    3. Les facteurs liés à la relation : La convivialité, le soutien affectif et technique, l’entraide, la coopération.
    4. Les facteurs liés à l’activité : La nature des activités (relever des défis, expérimenter de nouvelles idées, définir une stratégie, faire plaisir aux autres…)

    La figure ci-dessous présente le poids de chaque facteur à l’origine du sentiment de plaisir professionnel :

    les 4 facteurs de plaisir au travail

    Deux remarques s’imposent à la lecture de ce schéma :

    1 – Donner du sens et agir sur l’amélioration des conditions de travail ne permet pas d’améliorer le plaisir, mais renforce le bien-être ou réduit la souffrance. Les facteurs qui procurent du plaisir au travail sont donc la relation aux autres et les activités de l’emploi.

    C’est la raison pour laquelle il ne faut pas espérer des récentes mesures prises par les entreprises sur l’amélioration des conditions de travail et l’augmentation des salaires qu’elles aient un impact sur l’épanouissement. Rappelons d’ailleurs que la rémunération n’a jamais été un facteur de motivation mais de démotivation.

    2 – Le plaisir est egocentrique, ce qui explique qu’agir sur des facteurs exogènes (conditions de travail et entreprise) n’a que très peu d’effet sur l’épanouissement personnel. Ce constat n’est d’ailleurs pas nouveau puisqu’il a déjà été mis en évidence dans les années 50 par Frederick Herzberg avec sa théorie des facteurs de motivation.

    C’est donc du côté des relations humaines et de la nature des activités de l’emploi qu’il faut s’orienter, sachant que ce qui intéresse les salariés, suite à la crise, est avant tout d’exercer un métier qui leur procure du plaisir, l’appartenance à un groupe intervenant dans une seconde étape, ce qui remet au passage en question l’ordre de satisfaction des besoins proposé par Abraham Maslow dans sa pyramide.

    Cela étant dit, comment savoir si les activités de l’emploi que l’on souhaite pourvoir seront source de plaisir pour le candidat ?

    De la compétence (savoir-faire) à l’appétence (aimer-faire)

    Avant de répondre à cette interrogation, il est opportun d’inventorier les critères de sélection habituels des recruteurs.

    En premier lieu, il y a bien évidemment les diplômes et les compétences. Si c’est ce qui semble être le plus facile à évaluer, il n’y a cependant pas de corrélation systématique entre compétences et plaisir car ce n’est pas parce que l’on « sait faire » que l’on « aime faire » pour autant. Il existe beaucoup de personnes qui maitrisent un métier qu’ils n’aiment pas ou plus.

    Les autres critères habituellement évalués sont les besoins/motivations (Appartenir à un groupe, sécurité…), les traits de personnalité (Introverti, extraverti…), les valeurs (Respect, justice…) ou encore l’état d’esprit (Ouverture, humilité…), mais aucun de ces critères ne permet d’évaluer le niveau de plaisir qui pourrait être procuré par l’emploi.

    Certains feront référence aux « Soft skills » (F), ces compétences « douces » à l’honneur depuis quelques années. Nous ne résistons pas à l’envie de faire une petite digression sur ce sujet. Qualifier un concept par ce qu’il n’est pas, à savoir des « Hard skills » est  assez surprenant. C’est comme si vous qualifiez une oeuvre d’art en disant qu’elle ne ressemble à aucune autre.

    De plus, lorsque l’on découvre la liste des Soft skills les plus plébiscités, on se rend assez rapidement compte que ce ne sont pas des compétences mais la manifestation d’un état d’esprit (Confiance, esprit d’équipe, esprit critique…) ou d’un trait de personnalité (Adaptabilité, empathie, curiosité…).

    Outre ces précisions, les Soft skills étant des compétences, elles ne donnent aucune information sur le plaisir.

    Il fallait donc proposer un nouveau concept, que nous avons intitulé l’appétence.

    L’appétence est une aptitude qui répond à 4 principaux critères :

    • Elle est naturelle ;
    • Elle est facile à mobiliser pour la personne ;
    • Elle est source de plaisir ;
    • Elle mène au succès.

    Et surtout l’appétence est une capacité qui ne s’apprend pas, ce qui la différencie de la compétence. Elle est déjà en nous, consciemment ou inconsciemment. Prenons 3 exemples d’appétences :

    1 – La « débrouillardise », dont le plaisir est provoqué par le fait de faire preuve d’astuce ou de faire plus avec moins ;

    2 – L’originalité, dont le plaisir est lié au fait de ne pas faire comme les autres ou faire différemment de ce qui existe ;

    3 – La serviabilité, dont le plaisir est de faire plaisir aux autres.


    Découvrez notre jeu des 30 cartes appétences

    Connaissez-vous des formations qui apprennent à devenir débrouillard, à faire preuve d’originalité ou à faire plaisir aux autres ? Nous concernant, nous n’en connaissons pas. Et pourtant ces appétences sont essentielles pour certains métiers et s’avèrent très utiles, par exemple, pour évoluer dans un environnement V.U.C.A. (Volatile, (U)Incertain, Complexe et Ambigu).

    Utiliser l’appétence pour aider les personnes à changer de métier

    Pensez-vous qu’il soit possible de changer de métier plusieurs fois dans sa vie ?

    Sur le principe, tout le monde le croit, mais en pratique c’est une autre affaire et dans notre pays c’est pratiquement mission impossible.

    Une étude réalisée en 2018 par OpinionWay abordait déjà cette difficulté. Selon 71% des actifs sondés, changer de métier est jugé très difficile. Et quand on leur a demandé d’en expliquer les raisons, 63% ont avoué qu’ils ne savaient pas à qui s’adresser pour les aider dans cette recherche. L’autre frein, et certainement le plus important, est l’absence de volonté de leur employeur de les accompagner dans cette démarche ainsi que la réticence des recruteurs à donner une suite favorable à un candidat inexpérimenté.

    Tant que le marché était favorable aux entreprises, rien ne légitimait qu’elles remettent en cause leurs critères de recrutement. Mais face à la pénurie de candidats ou aux exigences de ceux qui ont le profil de l’emploi, les recruteurs commencent à s’ouvrir à de nouvelles approches et deviennent prêts à donner leur chance à des personnes inexpérimentées mais à potentiel.

    « Choisis un travail que tu aimes et tu n’auras pas à travailler un seul jour de ta vie ». Cette citation attribuée à Confucius souligne l’importance d’exercer un métier que l’on aime. Combien d’entre nous ont cette chance ? Comment savoir si un métier vers lequel on souhaite se réorienter sera source de plaisir et d’épanouissement ?

    Nous avons imaginé les appétences pour aider les personnes à trouver un métier qu’elles aimeront, mais cela nécessite de reconsidérer certains paradigmes.  

    Se questionner sur l’importance du diplôme pour exercer certains métiers

    « Nulle part ailleurs dans le monde la question de savoir où vous avez fait vos études ne détermine si profondément votre carrière », estime Peter Gumbel, auteur du livre « Elite Academy » alors que, selon le fondateur de Free et de l’école 42, Xavier Niel, « On peut être en échec scolaire, ne pas avoir le bac et devenir le développeur le plus brillant de sa génération ».

    Cette prégnance historique pour le diplôme semble visiblement être une particularité française et tient au fait qu’il aurait été considéré comme un critère méritocratique ainsi que le moyen de lutter contre les inégalités des chances au temps de l’aristocratie.

    Néanmoins, même si cette époque est révolue, le diplôme demeure encore l’un des principaux critères de sélection, essentiellement parce qu’il rassure les employeurs.

    C’est sans doute parce que la France a toujours eu un sens aigu de l’élite que les diplômes, notamment ceux des grandes écoles et universités, suscitent autant l’admiration alors que ce qui devrait être admirable est ce que les personnes apportent de positif au monde et il n’est pas nécessaire d’avoir des diplômes pour cela. Saviez-vous que Steve Jobs, François Pinault, Pierre Bérégovoy, Alain Ducasse ou encore Yves Rocher n’ont jamais eu leur bac ?

    Par ailleurs, force est de constater que ce qui se voulait plus équitable ne l’est pas vraiment car l’accès aux enseignements dispensés par les écoles de renom est majoritairement accerssible aux jeunes issus de familles les plus aisées, même si notre pays se montre assez généreux en attribution de bourses étudiantes (38% des étudiants en enseignement supérieur sont boursiers en 2020-2021) (G).

    Si les diplômes sont indispensables pour accéder à certains métiers (médecin, pilote…) ils ne doivent pour autant pas constituer un rempart à l’accès à l’emploi pour la majorité des métiers dont la maîtrise repose davantage sur le savoir-faire expérientiel que sur les connaissances théoriques.

    De plus, que penser de la pertinence des compétences acquises durant les études lorsque l’on sait, comme le souligne l’OCDE, que la durée de vie des compétences techniques est passée de 20 ans en 1970 à 2,5 ans aujourd’hui et qu’elle tombera a priori à 1 an en 2025 ?

    Ce constat est conforté par un rapport du World Economic Forum qui met en avant la nécessité pour les salariés qui resteront en poste de renouveller au moins 40% de leurs compétences dans les 5 prochaines années, compte tenu de l’accélération de l’évolution de la société et des nouvelles technologies.

    La crédibilité technique ne reposera donc plus uniquement sur l’expérience mais sur la capacité à acquérir régulièrement et rapidement de nouvelles compétences, ce qui, comme nous l’évoquerons plus bas, s’avère beaucoup plus aisé quand on aime ce que l’on fait.

    De surcroît, continuer de conditionner l’accès à des métiers aux diplômes risquerait bien de décourager certains potentiels qui satisferont leurs ambitions dans l’entrepreunariat, ce qui semble d’ailleurs être une tendance post Covid-19 si l’on se réfère à certains sondages, tel que celui de Jobby Pepper qui évoque que 70% des salariés préfèreront, à salaire égal, le statut d’indépendant à celui de C.D.I. ou encore à l’étude réalisée par Oninion Way en 2021 au sein de laquelle 46% des Français déclarent que la crise a suscité chez eux des vocations d’entrepreneur.

    L’approche par les appétences présente comme intérêt de s’autoriser à s’émanciper de la primauté des diplômes pour accéder à l’emploi.

    Privilégier l’aimer-faire avant le savoir-faire

    Comment réagissent nos institutions lorsqu’elles doivent gérer une forte pénurie de main d’œuvre ? Elles piochent dans le vivier des demandeurs d’emploi, les forment puis les incitent à postuler.

    Cette démarche est extrêmement logique mais elle coûte souvent bien plus cher qu’elle ne rapporte. Selon une étude publiée par Hay Group en 2017, 4% des nouvelles recrues quittent leur job dès le 1er jour, 22% dans les 45 premiers jours et le principal motif de ces départs est le manque d’épanouissement.

    Par ailleurs, selon l’Insee, le taux de turn-over en France est passé de 13,7% à 15,1% en 10 ans. Bien qu’il soit inférieur au taux moyen mondial, qui est de 23%, il est fort probable qu’il augmentera encore, si l’on considère les prévisions de Pole Emploi qui estime que les jeunes actifs d’aujourd’hui changeront en moyenne 13 à 15 fois d’emploi durant leur carrière (H).

    differences recrutement competences appetences

    Il y a donc urgence à limiter cette gabegie. Proposer des formations à des demandeurs d’emploi, oui, mais à condition d’avoir évalué au préalable qu’il sera source d’épanouissement. Cette nouvelle approche permettrait d’éviter de financer inutilement des actions de formation.

    Recruter par les appétences permet d’offrir l’opportunité à des personnes de candidater à des offres d’emploi sans qu’elles aient les compétences parce que l’on considère que, si les activités confiées seront source de plaisir, elles apprendront plus vite et seront plus durablement engagées.

    Ce postulat est d’ailleurs démontré par la neuroscience et plus particulièrement les travaux relatifs au « Circuit de la récompense ». La dopamine sécrétée par la mobilisation des appétences a un effet sur de nombreuses fonctions cognitives, telles que la mémorisation et l’apprentissage.

    circuit de la recompense

    Des chercheurs du M.I.T. ont mis en avant que le plaisir qu’une personne ressent à réaliser certaines activités l’incite à recommencer. La dopamine se propage dans de nombreuses zones du cerveau et renforce les connexions neuronales qui ont été mobilisées dans l’action couronnée de succès.

    Ils ont également découvert que le même résultat obtenu de façon répétée libère moins de dopamine, ce qui nous pousserait à vouloir aller plus loin et nous perfectionner. C’est la raison pour laquelle l’acquisition de nouvelles compétences est plus facile et rapide lorsque l’on met un salarié dans sa « zone de plaisir ».

    De plus, allier l’appétence à la compétence permet d’atteindre, ce que le psychologue Mihaly Csikszentmihalyi, appelle le « Flow », ces instants pendant lesquels nous perdons complètement la notion du temps, où nous avons l’impression d’être à 100% à ce que nous faisons et éprouvons un plaisir intense à le faire.

    Le processus idéal de sélection de personnes qui n’ont ni les diplômes, ni l’expérience, ni les compétences requis consiste donc, dans un premier temps, à apprécier l’adéquation entre les appétences de l’emploi et celles du candidat, puis, dans un deuxième temps, à évaluer ses aptitudes techniques (à ce titre vous pouvez vous inspirer de la méthode de recrutement par simulation proposée par Pôle Emploi) et, seulement après, lui proposer une formation.

    Si le recrutement par les appétences constitue une réelle prise de risque pour l’entreprise, elle a cependant pour intérêt de s’ouvrir à de nouveaux profils, de réduire la probabilité de désengagement et de « démission silencieuse », ce phénomène popularisé suite à la crise sanitaire.

    Cependant, comme rien ne peut être garanti, il est indispensable de bien utiliser la période d’essai avant de confirmer l’embauche définitive, ce que font trop peu d’entreprises.

    Les fondements du recrutement par les appétences étant à présent posés, découvrons à présent comment l’utiliser concrètement en recrutement.

    Appétences et compétences d’un emploi, quelles différences ?

    Avant de présenter les modalités d’utilisation, nous vous invitons à découvrir ce que sont les appétences par vous-mêmes, en en sélectionnant 5 parmi les 30 que nous vous proposons  :

    AUTODIAGNOSTIC 30 APPETENCES DYNESENS

    Recruter par les appétences consiste dans un premier temps, pour l’entreprise, à choisir les 4 à 6 appétences de l’emploi qu’elle souhaite pourvoir. Il est préférable que cette sélection soit faite en groupe et plus particulièrement par les titulaires de l’emploi.

    appetence commercial

    Comme le met en évidence la figure ci-dessus, les appétences, contrairement aux compétences, peuvent être différentes pour un même emploi, ce qui donne une information précieuse sur la culture de l’entreprise.

    Dans cet exemple, il apparaît nettement que le profil du commercial de l’entreprise A est plutôt de type « empathique » alors que celui de l’entreprise B est plutôt de type « chasseur », si l’on se réfère aux typologies habituellement utilisées pour les métiers de la vente et du commerce.

    Disposer d’informations sur la manière dont sont appréhendées les activités est devenu fondamental car un désaccord sur ce sujet est souvent à l’origine de tensions, voire de démissions.

    L’appétence apporte donc une information intéressante sur les valeurs de l’entreprise, ce qui est devenu essentiel depuis le confinement, si l’on se réfère à une enquête d’Opinion Way de 2021 qui souligne que 50% des Français accepteraient un salaire de 10% moins élevé pour rejoindre une entreprise qui partage leurs valeurs (I).

    Mais l’aspect innovant de l’appétence est tout autre. Elle permet, comme l’illustre la figure suivante, de créer des passerelles d’évolution professionnelles entre métiers aux compétences complètement différentes, ce qui ouvre de nouvelles perspectives sur la réorientation professionnelle.

    Une personne qui a sélectionné les appétences mises en avant dans l’exemple ci-dessus pourrait, selon ce modèle, prétendre à exercer ces 4 métiers, d’autant que l’acquisition des compétences nécessaires pour réaliser convenablement les activités nécessitera en moyenne entre 3 et 6 mois de formation.

    Recruter par les appétences, comment faire ?

    Le concept des appétences peut être utilisé par les entreprises dans le cadre de leur recrutement mais aussi dans le cadre d’évènements à plus grande échelle.

    C’est ainsi qu’en mai 2019, la CCI Seine Estuaire a utilisé cette approche pour organiser un événement sans précédent intitulé « Les rencontres sans C.V. » qui fut basé sur deux promesses :

    • Pour les candidats, « Vous allez peut-être découvrir un métier qui vous plaira et auquel vous n’aviez pas pensé»
    • Pour les entreprises, « Vous allez peut-être rencontrer un candidat à fort potentiel que vous n’auriez jamais croisé autrement».

    C’est ainsi que plus de 2.000 candidats sont allés à la rencontre de 150 entreprises qui proposaient 350 postes à pourvoir uniquement sur la base de leurs appétences, sans connaître le nom de l’entreprise, ni l’emploi proposé.

    Fort de ce succès (environ 30% des entretiens en mode « Speed dating » ont débouché sur un contrat), le Club Innovons pour l’emploi de l’Ile de la Réunion a organisé une manifestation similaire au mois de juin 2022, afin de se faire rencontrer 1.500 demandeurs d’emploi et 120 entreprises, après une année de sensibilisation de ces deux acteurs majeurs par le biais d’ateliers d’appropriation de cette approche innovante.

    https://www.youtube.com/watch?v=fDGU9ul7R48https://www.youtube.com/watch?v=DAjOafFdOQw

    Ces deux évènements ont réuni plus de 4.000 candidats et 470 entreprises. La réussite de ces rencontres ne tient évidemment pas qu’au concept des appétences mais avant tout repose sur la mobilisation conjointe des principaux acteurs du marché de l’emploi, à savoir la Dreets, Pôle Emploi, les OPCO, les organisations patronales, les entreprises et bien sur les personnes en recherche d’emploi.

    L’autre particularité de ces rencontres et qu’elles se sont déroulées sans pression et en toute convivialité puisque qu’il n’y avait pas d’obligation de résultat, l’objectif étant avant tout de se faire se rencontrer des personnes qui ne se seraient jamais rencontrées autrement.

    Pour que ces rendez-vous ne tournent pas à une simple « Discussion de comptoir », les échanges ont été guidés par une matrice qui croise les notions de savoir-faire et d’aimer faire.

    Les candidats ont été invités à exprimer, pour chacune des missions de l’emploi, le niveau de plaisir qu’ils auraient à les réaliser ainsi que le niveau « présupposé » de facilité et de rapidité d’acquisition des compétences, comme l’illustre l’exemple ci-dessous.

    Cette matrice peut par ailleurs être utilisée dans le cadre des entretiens annuels ainsi que des entretiens professionnels.

    A contexte nouveau, nouvelles approches

    Nul ne peut contester que le monde a changé depuis cette crise sanitaire. Il ne ressemble pas à celui d’hier et ne ressemblera pas à celui de demain.

    Les habitudes ont la vie dure, surtout en management, qui évolue à la vitesse d’un escargot par rapport à beaucoup d’autres domaines. Si elles ont pour vocation de nous rassurer, elles constituent également un énorme frein à l’innovation dont nous devons faire preuve pour s’adapter à l’évolution de plus en plus rapide de notre environnement.

    Parce que les entreprises ne sont pas imperméables à leur environnement. Elles ont par conséquent deux choix en matière de recrutement.

    Le premier consiste à s’entêter à vouloir trouver des candidats qui répondent en tous points aux descriptions de postes. Vous l’avez compris, elles risquent fort d’attendre longtemps.

    Le second consiste à prendre le risque de se réinventer et d’expérimenter de nouvelles approches.

    Nous avons écrit cet article à cet effet, avec l’espoir qu’il permettra aux entreprises et candidats qui se ressemblent de se trouver.

    Et après avoir recruté sur les appétences, on fait quoi ?

    livre le plaisir au travail

    La sélection sur la base des appétences n’est que le début de l’histoire.

    Découvrez dans notre livre comment utiliser les appétences dans de nombreux domaines (Engagement, entretien annuel, conduite de projet, évolution professionnelle…)

    (A) Source : Insee 2ème trimestre 2022

    (B) Source : « La vie publique » du 23 août 2022

    (C)  Source : Article Les Echos du 10 février 2022

    (D) Source : Analyse de la Dares d’août 2022

    (E)  Les « soft skills » sont définies comme toutes les compétences qui ne sont pas « hard » (techniques)

    (F) Livre « Le plaisir au travail, de l’aimer-faire au savoir-faire », de Francis Boyer, Éditions Eyrolles, juin 2018

    (G) Source : Note flash du ministère de l’Enseignement supérieur de sept. 2021

    (H) Source : Rapport Pôle Emploi de 2019

    (I) Source : Sondage Opinion Way 2021

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